
Portrait Karichma Ekoh, l’indomptable lionne camerounaise du handball féminin

Vice-championne d’Afrique de handball avec le Cameroun, l’ambitieuse arrière de 23 ans, récente recrue de Fleury, en France, vit un Mondial féminin compliqué et pas à la hauteur de ses attentes. Portrait d’une joueuse qui vise haut et parle sans détour.
« J’ai honte ». Pas plus que d’habitude, Karichma Ekoh ne mettra sa langue dans sa poche pour résumer son séjour à Lliria, près de Valence (Espagne), où le Cameroun tente de faire bonne figure dans les championnats du monde de handball féminin, sans succès jusqu’à présent.
Balayées par la Russie (40-18) et écrasées par la Serbie (43-18) lors des deux premiers matches du tour préliminaire, les vice-championnes d’Afrique galèrent dans un Mondial où l’arrière du Fleury Loiret Handball, dans la région d’Orléans, tente de maintenir l’équipe à flot (11 buts sur les deux rencontres). Mais les écarts au score étaient assez prévisibles vu l’absence de vision tactique.
« La stratégie de jeu et la vidéo devaient être le domaine des spécialistes brésiliens avec qui on a travaillé durant la CAN, et c’est grâce à eux qu’on s’est qualifiées, explique la joueuse de 23 ans. Mais ils n’ont pas été reconduits. Aujourd’hui, on paye les pots cassés. »
Et Karichma Ekoh d’égratigner les autorités sportives sur la préparation globale bien légère de ce Mondial, qu’elle a préféré rejoindre par ses propres moyens sans participer au regroupement de Yaoundé : « La fédération camerounaise a reçu 15 000 euros de la Confédération africaine pour notre médaille d’argent à la CAN. Comment cet argent a-t-il été géré ? Au lieu de faire un stage en France ou en Espagne pour s’adapter au climat, les filles sont restées un mois et demi en Afrique avec seulement quinze jours de handball et un seul match contre des garçons sur un terrain en béton. »
De Nantes à Fleury
Finalement, son vrai plaisir en cette fin d’année est sans doute d’avoir retrouvé début novembre les parquets de Ligue Butagaz Énergie (le Championnat de France de D1) après plus d’un an passé dans l’antichambre de l’élite, à Celles-sur-Belle, un club des Deux-Sèvres. Karichma Ekoh y a brillé, mais ne s’y sentait plus forcément à sa place.
La deuxième division allait pourtant demeurer son quotidien cette saison, cette fois à la Stella Saint-Maur, si Fleury, au plus mal depuis le début de la saison (lanterne rouge avec aucune victoire en neuf matches) et plombé par les absences de longue durée, n’avait pas vu en elle et sa polyvalence sur la base arrière un bon joker médical. Une opportunité immanquable.
La fédération camerounaise, elle, avait approché Karichma Ekoh dès ses 16 ans lorsqu’elle mûrissait à Aulnay-sous-Bois (Nationale 1, la 3e division). En disant finalement oui, elle ne s’imaginait pas encore combien une CAN pouvait être une expérience particulière, a fortiori en temps de Covid-19 : « Honnêtement, c’est la pire compétition que j’ai pu faire en termes d’organisation, lâche-t-elle sans détours. Pendant la compétition, je suis tombée malade, ça m’a traumatisée. »
Au point de ne pas retenter l’aventure lors de la prochaine édition prévue au Sénégal en décembre 2022 ? En tout cas, elle ne cache pas que ses ambitions prioritaires sont plus personnelles et que ses prestations au Mondial auront su attiser la curiosité de clubs cotés qui satisferont un jour son rêve, rejoindre le club hongrois de Györ, quintuple champion d’Europe, et sa galaxie de stars. « Mais avant, j’aimerais connaître la culture du championnat allemand en matière de rigueur et d’hygiène de vie », précise Karichma Ekoh.
Et si le destin ne lui permet pas de suivre un tel parcours, elle pourra toujours s’épanouir dans sa carrière parallèle naissante d’entrepreneuse, importatrice de vernis naturel du village familial au Cameroun. Une autre façon de relier sa vie à ses origines.